Salarié d'un grand groupe je m'ennuyais ferme. J'avais fait le tour de la question en passant par à peu près tous les postes que mon diplôme pouvait me permettre d'occuper ... Et puis un beau jour, un ami me propose de passer de l'autre côté de la barrière en créant une entreprise. Quelques séances de brainstorming plus tard, je me dis que finalement la reprise d'une entreprise est peut-être une meilleure solution.
Je m'inscris donc à un groupe de repreneurs (le CRA pour ceux qui ne connaîtraient pas). Dans ce groupe, je trouve une véritable énergie pour mener mon projet à bien. D'ailleurs, après une année de participation arrive un dossier qui m'intéresse. Mais avec un gros risque : l'entreprise à reprendre est dans un secteur que je ne connais pas, dans une région éloignée de celle où je vis et surtout, elle est sous plan de redressement (voir à ce sujet la rubrique consacrée à ce statut).
Mais à cette époque, rien ne m'effraie et je décide donc de me lancer corps et âme dans l'aventure, après bien sûr avoir reçu l'aval de mon entourage (voir à ce sujet l'article Création vs Reprise et ma propre analyse de ce sujet). Je passe les différentes étapes de montage du dossier et de négociation avec le cédant pour en arriver au jour J, celui du 31 août 2006 où je débarque dans le Sud-Ouest pour signer les actes de cession de parts qui me rendent propriétaire de l'entreprise que je vais diriger à compter de ce jour !
Au début, tout va plutôt bien. Je réussis à développer l'activité de l'entreprise, mets en place quelques actions tendant à la structurer, investis, ... Mais tout à mon ouvrage, je ne vois pas les nuages s'accumuler au loin. Et pourtant, j'aurais dû voir que la trésorerie était exangue, que mes encours étaient très hauts, que ma rentabilité était extrêmement faible. Mais j'ai continué. Et puis, vers mi-2009, c'est l'iceberg : un important marché qui devait se terminer dans l'année, est décalé à l'année suivante. Et là tout s'enchaîne : traites rejetées, prélèvements sociaux et fiscaux (ASSEDIC, URSSAF, TVA) refusés pour manque de provision suffisante sur les comptes ... Sans parler des problèmes sociaux à traiter : la révolte gronde et un vent de sédition se lève.
Et puis vient ma décision de mettre l'entreprise en Sauvegarde en mars 2010. S'en suivent des licenciements économiques où un quart de l'effectif disparaît. Mais cela ne suffit pas et l'entreprise crée des dettes nouvelles ... Or cela est interdit ! La Sauvegarde est donc commuée en Redressement Judiciaire en Octobre 2010. Le doute s'installe partout : chez les clients, chez les fournisseurs, en interne. Je trouve donc une solution : m'associer avec un tiers qui veut investir, quitte à ne plus être seul aux manettes. Mais la situation est telle que le mandataire judiciaire qui suit le dossier nous conseille la Liquidation Judiciaire pour repartir sur une base saine (pardon pour les créanciers, sacrifiés dans ce cas ...). Et c'est ainsi qu'en mars 2011, soit un an après l'entrée dans le monde des "procédures collectives", la Liquidation Judiciaire de l'entreprise est prononcée.
Et bien, cela peut paraître curieux, mais cela a été un soulagement ! D'une part parce que mon ex-futur associé a pu reprendre les actifs et faire redémarrer l'entreprise, d'autre part parce qu'il m'a gardé comme salarié pour l'aider à piloter ce paquebot et enfin parce que nous repartions sur des bases saines où le cercle vertueux de Fournisseurs satisfaits = bonne conditions de règlement = BFR plus faible = pas de problème d'approvisionnement = clients satisfaits était de nouveau en place. Mais, que de souffrances pendant un an !
C'est ce qui m'a poussé à écrire ces articles. J'ai en effet énormément appris pendant ces années et surtout cela m'a aguerri et montré que la devise des Légions Romaines ce qui ne nous tue pas, nous rend plus fort est vraie. Et je souhaitais faire partager cette expérience avec d'autres pour les aider à réorienter leur stratégie quand il en est encore temps pour éviter d'aller dans le mur !
Enfin il y a un aspect fondamental : pendant toutes ces épreuves, ma famille et mes amis m'ont soutenu sans défaillir et c'est sans doute grâce à eux que je suis fort aujourd'hui. Mon dernier fils est né au moment où la barque tanguait et où les crocodiles du fleuve commençaient à s'approcher. Il a aujourd'hui deux ans et pour lui "crocodile" se dit "coudil", d'où le nom de ce journal de bord. Car il faut éviter de se faire croquer par ces "coudils" et pour cela, suivre les quelques pistes que je propose ...
En guise de conclusion, je dirais que ces expériences m'ont permis de rebondir car je suis actuellement en train de créer une nouvelle entreprise, mais avec une approche complètement différente de celle que j'avais en 2006. Car une chose est certaine : entreprendre est une maladie dont on ne guérit jamais !
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