lundi 20 mai 2013

Ce qui caractérise une entreprise en difficulté



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Il y a quelques années, le supplément Entreprise de l'Express publiait une série d'articles sur la méthode utilisée par Buttler Capital Partners pour relancer une entreprise défaillante.

En effet, les associés de Buttler Capital Partners ont, au cours de leur existence, eu l'occasion de travailler sur des centaines d'entreprises en difficulté afin de les restructurer. Même si chaque cas est différent, de leur expérience ont peut malgré tout retirer plusieurs points communs.

Evidemment, cela ne signifie pas que le fait d'avoir une entreprise avec ces caractéristiques va la conduire vers des difficultés importantes, mais en revanche, cela signifie qu'elle aura de grandes chances de défaillir. A l'inverse, le fait d'identifier ces points et de les traiter convenablement peut permettre de pérenniser une activité, voire d'y apporter de la croissance.



Pour résumer, les caractéristiques principales d'une entreprise en difficulté sont : un problème de structure de bilan, les simples salariés ne sont pas responsables des problèmes, une faible visibilité sur les besoins financiers, un manque de dialogue social, des coûts trop élevés, un déficit de communication, un cloisonnement excessif, une perte de confiance, un manque de vision à moyen ou à long terme.

1) Problème de structure de bilan

La première chose à regarder dans un bilan, sans rentrer dans les détails est la composition de l'actif circulant, c'est-à-dire pour simplifier, la somme des créances clients, des stocks et des disponibilités. De l'autre côté on regarde les dettes qui sont la somme des dettes fournisseurs, des dettes financières et des dettes fiscales et sociales.

Si les dettes sont supérieures à l'actif circulant, cela pose un problème car cela signifie que pour payer les dettes, l'entreprise devrait virtuellement réaliser son actif immobilisé ... Par ailleurs, lorsqu'on regarde en détail ces postes de bilans, la lecture du poste des dettes fournisseurs et celui des créances clients peut être riche d'enseignement.

En effet, on a coutume de dire qu'il faut considérer les dettes fournisseurs comme immédiatement exigibles tandis qu'on ne peut a priori compter sur les créances clients. Cela signifie que si le montant des dettes fournisseurs est sensiblement plus important que celui des créances clients, il y a un problème ...

Enfin, toute cette lecture doit s'inscrire dans une dynamique. Ce qui est important c'est de voir l'évolution de ces postes et de leurs variations relatives. Cela permettra de mettre en évidence un passage à vide ou une lente dégradation.

2) Les simples salariés ne sont pas responsables

Il s'agit là d'une relecture du célèbre adage "on a les salariés qu'on mérite" ou encore "tel dirigeant, tel salarié". En clair, cela signifie que si une entreprise va mal c'est rarement à l'initiative des salariés de base.

En revanche, les cadres dirigeants ou les managers intermédiaires peuvent avoir une responsabilité réelle dans la situation de l'entreprise. Encore que, encore une fois, tout revienne au niveau du dirigeant car c'est son rôle de se séparer des salariés qui ne vont pas dans le sens de l'entreprise.

En d'autres termes, si le dirigeant conserve au sein de l'entreprise des salariés qui peuvent conduire à sa perte, c'est de sa seule responsabilité.

3) Une faible visibilité des besoins financiers

Combien de dirigeants ne savent pas quels seront leurs besoins financiers dans 3 mois ou 6 mois ? Beaucoup plus qu'on ne le pense. En effet, la plupart des dirigeants se contentent généralement d'une vision à quelques jours voire à quelques semaines.

Pourtant, la mise en place d'un plan de trésorerie sur une année n'est pas très compliqué. En effet, à part les achats, la plupart des dépenses sont connues d'avance : salaires, charges sociales, charges courantes (électricité, eau, gaz, assurances, loyers, etc.). Les achats, quant à eux sont généralement une partie connue ou en tout cas bien estimée du chiffre d'affaire réalisé.

Il est donc parfaitement réalisable de mettre en place un tel plan. Cela peut mettre en avant une faiblesse structurelle de l'entreprise avant que celle-ci n'ait d'effets concrets et catastrophiques sur l'entreprise.

L'autre intérêt de procéder ainsi c'est que cela formalise les besoins et donc permet de fixer des objectifs chiffrés à ses collaborateurs.

4) Un manque de dialogue social

On a souvent parlé de la solitude du dirigeant, mais en étant un peu dur avec ces derniers, il faut reconnaître que certains ne font rien pour sortir de cette solitude. Face aux problèmes qui s'accumulent, plutôt que de prendre le taureau par les cornes et d'impliquer l'ensemble du personnel, ces dirigeants se renferment sur eux-mêmes, comme s'ils avaient peut d'être jugés par leurs salariés parce qu'ils ont faillis.

Le dialogue social est crucial dans une entreprise, qu'elle ait ou non des instances représentatives. Cela permet d'être à l'écoute des problèmes qui remontent de la base de l'entreprise ou des clients et, en les traitant rapidement, de désamorcer des points durs qui peuvent devenir de véritables bombes.

Par ailleurs, si rien n'est fait, lorsque les problèmes deviendront trop importants, le dirigeant ne pourra plus compter sur ses salariés pour aider l'entreprise à rebondir.

5) Des coûts trop élevés

Dans certains cas, on part des coûts pour en déduire un prix de vente. Le problème est qu'en procédant de la sorte, on risque de passer à côté de son marché. Car c'est bien le marché qui généralement impose ses prix.

En conséquences on peut se retrouver avec des coûts qui sont trop élevés par rapport à ce qu'exigerait un marché. Ces coûts peuvent être directs ou indirects. Ainsi, le fait de sous-traiter une partie de la production peut permettre de diminuer les coûts directs. Mais si la qualité de la production conduit à en refuser une partie, cela conduit à des coûts indirects parfois importants.

C'est pourquoi il est très important de bien analyser tous les coûts afin de les diminuer globalement.

6) Déficit de communication avec l'extérieur

On parle souvent de "partenariats" noués avec des intervenants extérieurs à l'entreprise. Qu'il s'agisse de fournisseurs ou de banques, tout le monde a déjà entendu cette expression de partenaire. Pourtant, lorsque le navire tangue, les partenaires d'hier deviennent les créanciers d'aujourd'hui et ne cherchent généralement qu'une chose : perdre le moins d'argent possible.

Pourtant, si on communique fréquemment et qu'on échange régulièrement avec ses "partenaires" dans les bons ou les mauvais moments, il y a moyen d'éviter les problèmes. Que cela soit en négociant un étalement des dettes par exemple ou encore en convainquant un fournisseur de garder un encours chez vous alors que les assureurs-crédits ont dégradé votre entreprise.

A contrario, une entreprise qui s'enferme dans son mutisme fait peur et inquiète. La conséquence est une perte de confiance avec des conséquences parfois dramatiques.

7) Un cloisonnement excessif

Lorsqu'au sein d'une entreprise les personnes ne dialoguent plus entre elles, cela crée des pertes d'information et donc une perte d'efficacité globale. Pourtant, certains services ou certains départements, en travaillant conjointement, peuvent augmenter de manière sensible leur efficacité et donc leur rentabilité.

Les échanges d'informations permettent également une meilleure réactivité ce qui peut s'avérer un atout majeur face à la concurrence.

Enfin, le fait de dialoguer au sein de l'entreprise permet de créer une cohésion de l'ensemble qui est la condition nécessaire à un esprit d'entreprise. Cela n'est bien entendu pas suffisant car pour que cela fonctionne bien, le dirigeant devra alors animer le tout.

8) La perte de confiance

La perte de confiance est généralement le fait d'un déficit en dialogue.

Elle peut concerner les partenaires extérieurs : clients, fournisseurs, associés, financeurs, etc. mais aussi le personnel. Dans les deux cas, cela conduit l'entreprise vers de graves problèmes dans la mesure où ces personnes ou ces entreprises n'interviendront pas pour aider la société en difficulté. Sauf si celle-ci fournit des garanties solides, ce qui est très difficile lorsque l'entreprise va mal.

Si un partenaire a confiance, il aura tendance à croire le discours du dirigeant qui négociera un étalement de ses dettes avec lui. S'il n'a pas confiance en revanche, il sera tenté de tout faire pour récupérer le maximum de ses dettes dans le minimum de temps, soit en mettant la pression (refus de livrer faute de paiement par exemple), soit en modifiant drastiquement les conditions de règlement (passage au règlement sur pro forma), soit en assignant l'entreprise devant le Tribunal de Commerce pour obtenir un règlement rapide de sa dette.

En interne, les conséquences d'une perte de confiance sont tout aussi dramatiques puisque cela peut par exemple conduire à des démissions de personnes clefs qui ne veulent plus rester dans l'entreprise ou par des grèves.

9) Un manque de vision à moyen terme

Lorsque l'entreprise va mal, le dirigeant a tendance a vouloir se concentrer sur la résolution des problèmes qui se posent dans l'immédiat : payer tel fournisseur, répondre aux huissiers, mettre la pression sur les équipes commerciales pour boucler le chiffre d'affaires du mois.

Même si toutes ces tâches sont importantes, non seulement il n'est pas nécessaire que ce soit le dirigeant qui les effectue, mais en plus, il faut qu'il s'assurent qu'elles s'inscrivent bien dans un plan à plus long terme.

Par exemple, le fait d'avoir des problèmes de règlement avec un fournisseur ne doit pas contraindre le dirigeant à trouver une solution immédiate. Il faudra par exemple en profiter pour en chercher d'autres ou voir si les produits réalisés et concernés par ce fournisseur doivent être maintenus ou non.

Cette analyse systématique et cette mise en perspective des difficultés permet de les trier selon leur degré d'importance et d'urgence.


Un dirigeant qui néglige sa communication tant en interne qu'en externe, qui ne traite que les incendies qui se déclarent et a empêché tout échange d'information entre salariés va perdre la confiance de ses collaborateurs et de ses partenaires. Il va alors se retrouver isolé et dans l'incapacité de résoudre les vrais problèmes. Sa capacité à rebondir s'en trouvera alors fortement compromise.


Et selon vous, qu'est ce qui caractériserait une entreprise en difficulté ?

Pour aller plus loin : 



           

1 commentaire:

  1. Cette approche est particulièrement intéressante, car elle va au-delà de la seule analyse financière. L'implication des salariés, le dialogue et la confiance ne sont guère quantifiables, mais le chiffre d'affaires et les résultats de l'entreprise en seront le reflet à court terme.

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